Un casting gratiné
Si jouer à Shadows of The Damned peut se faire par inadvertance, au détour d'un rayon de supermarché ou à la faveur d'un vendeur d'enseigne spé un peu trop enjoué, il reste indéniable que le finir revient à adhérer à 100 % à l'univers psychédélique de Goichi Suda alias Suda 51, géniteur du déjanté mais excellentissime Killer7.
Et personnellement, j'adhère complètement. Mais Suda n'est pas la seule pointure du projet car le développeur, Grasshoper Manufacture, réunit aussi le maître, j'ai nommé Mikami San de son prénom Shinji, père de la série Resident Evil. Lui aussi était présent sur le développement de Killer7, normal me direz-vous puisque c'était déjà Grasshoper qui était en charge du projet, et ce, dans le cadre du fameux Capcom Five.
Côté bande originale, on hérite du talent de Akira Yamaoka, compositeur des bande son de tous les Silent Hill. On peut donc affirmer sans bémol que pour camper une ambiance, le monsieur maîtrise son sujet.
Je palabre et divague historiquement mais si vous suivez l'actualité ou êtes tout simplement un gamer assidu, vous devez certainement savoir tout ça :) Donc place au test à proprement parler.
Sans préambule
C'est sans fioriture que le jeu se lance une fois la galette enfoncée dans les entrailles de votre console. Pas de menus transitoire, ni même d'écran titre, on rentre dans le vif du sujet d'emblée et Paula, la dulcinée du Mexicain shooté à la testostérone, est en détresse.
Le point d'orgue du scénario. Tout est là et tient sur un post-it. Alors quoi, un prétexte au défouraillage de démon à grand coup de Hot Boner ? Naan, mister Suda 51 a fort bien travaillé le background et notre mexicain énervé à une personnalité à tailler au diamant.
Entre deux bastos de Boner et une réplique salace et/ou vindicative, on comprend rapidement à la fin du tuto/intro qu'il va falloir arpenter tous les chapitres et sous-chapitres du jeu avant de retrouver cette pauvre mais dévergondée Paula.
Mets de l'huile !
Alors évidemment, ce qui intéresse le joueur, le vrai, au-delà de toute considération technique ou narrative, c'est le coeur du jeu, le gameplay quoi. Et là, on en appelle à Mikami San. Un bijou de fluidité et d'ergonomie ? Pas tout à fait. Il faut quelques minutes avant d'apprivoiser cette jouabilité un peu rigide et cette caméra un poil capricieuse. Mais passé le premier quart d'heure, on parvient à extraire la quintessence de ce gameplay qui dénote un peu en 2011 mais qui recèle une précision très agréable pour qui sait laisser le temps au temps.
Je constate qu'aujourd'hui, les joueurs sont plus impatients qu'avant, certainement du à la propension des développeurs à simplifier les jeux ou tout du moins la progression. A moins que cela ne soit l'inverse...
Alors même si, on conserve tout le long du jeu un arrière goût d'archaïsme, on parvient tout de même à prendre beaucoup de plaisir, d'autant que l'évolution du gameplay est suffisamment poussée pour apporter de la variété dans les combats. Il y a trois armes de bases, que l'on peut customiser jumêlées à un menu d'optimisation à gemmes très classique.
Mais le point intéressant vient du concept de ténèbres. Ténèbres dans lesquelles Garcia ne peut pas tenir éternellement, il doit donc user de nombreux stratagèmes pour pallier à ces situations. Entre tour à feux d'artifices, moutons, lanternes ou lampes sushis (!), il a de quoi faire. A savoir que chacune de ses armes a un tir secondaire de lumière qui permet soit de rincer les démons contaminés par les ténèbres, soit d'intéragir avec des objets particuliers.
Parfois, (souvent) il est nécessaire d'entrer dans les ténèbres pour vaincre un boss, passer une porte ou tout simplement traverser une zone. Cela donne lieu à une réflexion intéressante dans l'approche des niveaux et permet d'éviter le rush and shoot lambda et usant.
Une ambiance barrée
Autre point fort du jeu, elle tient de l'univers créé par Suda, mais également de la bande son de Yamaoka. Et là, je dois dire que j'ai adhéré complètement. C'est du très bon boulot, qui se marie merveilleusement à l'action et qui sait ciseler le rythme avec une précision effarante.
Rajoutez à cela des portes démons friands de fraise, des têtes de moutons avaleur de ténèbres ou encore ce bon Johnson, ancien démon qui sert à Garcia de substitut à un peu tout ce dont il a besoin (dont les armes), fan de stripteaseuse et on obtient un mélange assez détonnant qui donne la pêche et l'envie d'y revenir avec plaisir.
Finalement, ce Shadows of the Damned se laisse apprivoiser et distille tout au long de son aventure ses ressources et la patte de ses créateurs talentueux. C'est donc avec plaisir que je l'ai terminé avec cependant quelques petits regrets sur la linéarité relative du titre ainsi que quelques soucis de caméra et une ou deux phases de gameplay un peu lourde (Big Boner).